Wednesday, March 21, 2007

 

Le Confort

Le confort c'est cool si on peut s'en passer de temps à autre.

Ou, pourrait-on dire, si on peut l'inscrire dans une certaine pérénité des choses. Il s'agit de vivre bien, d'être bien avec ce que l'on a. Je suis par exemple très confortablement installé dans un fauteuil en osier qui appartenait à ma grand-mère et que je n'échangerais pour rien au monde contre un autre objet. La chaise de mon bureau, je l'ai achetée d'occase en seconde main pour 50 francs en 1987 et elle me va très bien.
Le confort, c'est pour moi de manger un bon petit plat - au rythme du slow food (je l'ai déjà écris ici en d'autres temps...) même si ce petit plat consiste en deux oeufs au plat avec un peu de paprika piquant dont le jaune encore liquide mais chaud est amené à ma bouche par une tranche de bon pain frais du boulanger du coin.
Le confort, c'est pour moi, d'aller au travail en empruntant le train rouge des CJ, en écoutant d'une oreille distraite les conversations des voyageurs doucement mixées avec les chansons de mon mini baladeur en métal brossé – tout en regardant à travers la vitre les regard angoissés des conducteurs ralentis par une route verglacée et que le train dépasse dans un souffle entre Le Noirmont et les Emibois. De lire mon livre ici tandis qu'eux ne sont que tension comme des élastiques dans leurs boîtes à quatre roues. De lire ceci dans mon livre :
"L'Occidental type consacre plus de 1500 heures par an à sa voiture.
Il y est assis en marche ou à l'arrêt; il travaille pour la payer, pour acquitter l'essence, les pneus, les péages, les contraventions, les impôts (et les taxes liées aux infrastructures routières et à la pollution que ce moyen de transport engendrent.).
Il consacre donc quatre heures par jour à sa voiture qu'il s'en serve, s'en occupe ou travaille pour elle.
A cet Occidental type il faut donc 1500 heures pour faire 15'000 km de route : environ 10 kilomètres lui prennent 1 heure !

Yvan Illitch (in "La Convivialité" 1973)

Et de penser qu'en 1973 j'avais 20 ans et que pour fêter ça, je fumais un havane, un gros...

Le confort c'est une barrière pour les insatisfaits, peut-être. Pour ceux qui, au contraire de moi, regardent avec envie passer les voitures depuis le train en y voyant l'autonomie de l'indépendance, la liberté individuelle contre le voyage collectif, le rêve du Salon de Genève, rutilant de chromes. Puisque c'est comme cela que c'est présenté...

Comment verraient-ils que la liberté c'est de déléguer, que l'indépendance est dans le collectif et que le voyage individuel est triste sans personne à qui parler ?

Comment imagineraient-ils que ces objets coûteux sont seulement des chaînes qui les forceront à renoncer pour avoir les moyens de les entretenir.

En 1973, j'avais 20 ans. Je fumais un havane. Et je ne voyais RIEN.

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